Zèfir et Masilda

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Lorsqu’ils arrivèrent vers la salle prévue pour l’interrogatoire, Davos attendait patiemment, adossé à l’un des murs du couloir. Il jeta un bref coup d’œil au trio avant de les ignorer. Et Anasteria ne manqua pas le petit soupir de Johan. Elle pouvait facilement comprendre la douleur de son ami, elle avait vécu quelque chose de similaire avec Ivona seulement quelques semaines auparavant. Un peu plus loin, près de la porte de la salle, Voxana discutait avec une autre femme qu’Anasteria n’avait jamais vue. Elle portait l’uniforme bleu des chevaliers-mages. Ses cheveux bruns descendaient sur des épaules qui arboraient quelques galons dorés. Ses yeux marron fixaient avec concentration Voxana. Mais lorsque les adolescents s’approchèrent un peu plus, elle reporta son attention sur eux. Son visage ne laissait paraître aucun sourire, et elle se tenait incroyablement droite et digne devant Voxana. La mère d’Ivona les regarda aussi, avec une expression de dédain à peine voilé.

 

— Je devrais vous laisser avec eux, Masilda, souffla-t-elle. Je vais continuer l’enquête. Je vous tiendrais au courant.
— Je vous remercie de votre aide, Voxana.

 

Voxana s’éclipsa aussitôt, non sans adresser un dernier regard aux étudiants. Masilda se tourna vers eux, et comme le veut la coutume, elle les salua avec le signe des mages.

 

 — Je me présente : Magistère Masilda Fe Dixa, responsable des affaires externes. Je coordonne les chevaliers-mages en dehors de l’empire. Vous êtes pile à l’heure.

 

Les adolescents eurent à peine le temps de répondre qu’elle les invita à entrer dans la salle de classe déserte. Anasteria commençait à s’habituer à ce genre d’exercice, et elle n’éprouvait désormais plus aucun stress à se trouver devant un magistère. Mais elle devait reconnaître que Masilda dégageait quelque chose d’intimidant dans sa posture.

 

— Prenez place, reprit-elle. Un autre magistère devait arriver sous peu.
— Bientôt, on aura plus de magistères ici qu’à la Flèche, murmura Ivona. 

 

Masilda se fendit d’un sourire mystérieux.

 

— Situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle.

 

Johan, Anasteria et Ivona s’assirent tous à côté, mais Davos se plaça un peu plus loin. Anasteria ne se souvenait pas l’avoir vu si fermé et si sombre et cela ne fit que renforcer sa culpabilité. La pièce plongea dans un lourd silence tendu. Masilda regardait certains parchemins qu’elle avait dans la main avec une certaine concentration. Cette dernière vola en éclat lorsque la porte s’ouvrit bruyamment.

 

— Désolé ! Je suis en retard !

 

Masilda soupira et secoua doucement la tête de dépit lorsqu’un homme entra dans la salle. Sa jeunesse surprit Anasteria. Certes, il demeurait plus âgé qu’eux, mais restait plus jeune que Masilda, ou encore Pavus. Ses courts cheveux noirs en bataille laissaient apparaître des oreilles légèrement pointues qui trahissaient le sang elfique qui devait couler dans ses veines. Sa peau hâlée contrastait avec le teint blanc de Masilda, et rappelait les peaux brunies par les soleils du côté d’Islac. Lui aussi portait l’uniforme des chevaliers-mages, ainsi que quelques galons sur les épaules. Mais ce qui attira vraiment le regard d’Anasteria, c’était l’esprit de feu qui marchait dans ses pas. De surprise, elle se leva d’un bond, et renversa sa chaise. Elle le pointa du doigt et s’adressa à Ivona.

 

— Dis-moi que tu le vois aussi !

 

Au vu de l’expression d’Ivona, Anasteria comprit qu’elle était seule à l’apercevoir. Mais un curieux sourire apparut sur le visage de l’homme et il ferma la porte.

 

— On dirait bien que je dois une bière à Voxana, elle avait raison.
— Raison à propos de quoi ? demanda Ivona.
— Pardon. J’oublie mes manières, bafouilla-t-il. Je suis Zèfir Toscan. Magistère des affaires internes.

 

Zèfir s’avança, mais sa jambe heurta un bureau et Anasteria vit Masilda lever les yeux au ciel. Zèfir grommela et frotta son genou avant de s’approcher d’elle.

 

— Voxana nous a envoyé une missive, expliqua Masilda. D’une part, pour nous donner son rapport, et d’autre part, car elle te trouvait… spéciale. Et au vu de la réaction de Zèfir, j’imagine que c’est le cas.
— Oh ! intervint-il. Oui. Pardon. Tout doit demeurer incompréhensible pour toi, Anasteria.
— Pas que pour elle, murmura Johan.

 

Masilda poussa un soupir et prit appui contre un bureau avant de fixer Zèfir d’un air sévère. 

 

— Explique-leur, ordonna-t-elle. Et calme-toi.
— Oui. Pardon, reprit-il. Je ne suis vraiment pas doué pour parler aux gens. Pour simplifier les choses, je suis un héritier d’Enariel, comme toi. C’est pour ça que tu vois mon esprit et je peux voir le tien.

 

Le cœur d’Anasteria rata un bond. Elle n’était pas seule à être comme ça, Voxana ne lui avait pas menti. Elle déglutit, et usa de tout son sang-froid pour parler le plus clairement possible.

 

— Alors, vous savez ce qui m’arrive ? Et pourquoi subit-on toutes ces attaques ?
— Oui, répondit-il. Pour être honnête, je ne m’attendais pas à ce que Voxana ait raison. Non pas que je remette en doute ses capacités, bien sûr. Mais je n’avais encore jamais trouvé quelqu’un comme moi. On dirait que les héritiers demeurent rares ces derniers temps. Et s’ils se font attaquer comme toi, ce n’est pas une surprise. Notre sang est spécial, comme tu l’as sans doute remarqué. Les autres mages doivent appeler un esprit à travers le voile avec qui ils ont établi un contrat, puis fusionné avec pour pouvoir manipuler plus facilement la magie. C’est la base. Mais pour nous… Nous nous trouvons constamment entre les deux mondes, nous pouvons ressentir les énergies sans l’aide dde nos esprits. Nous possédons un lien permanent avec le Dörmanlain, et nos esprits sont une partie de nous. On ne peut pas en choisir un autre.

 

Anasteria regarda sa main brûlée et songea aux paroles de Ryse.

 

— Les deux facettes d’une même pièce, souffla-t-elle. C’est ce que Ryse, je veux dire, mon esprit m’a dit.
— Oui, reprit Zèfir. C’est comme si lorsque nous naissons, nous étions séparés de notre esprit. Il peut te voir dans son monde, et tu peux le voir dans le tien. Il n’est pas une entité à part, c’est toi, comme un reflet dans un miroir. 

 

Anasteria regarda Ryse qui changeait de forme constamment pour passer le temps. C’était une de ses habitudes. Il garda finalement la silhouette d’Anasteria et esquissa un sourire.

 

— J’ai cru comprendre que tu avais tenté de fusionner, reprit Zèfir.
— Je n’aurai pas du, soupira Anasteria. Et avant que vous me fassiez une leçon, je ne regrette pas. 

 

Zèfir leva les mains en signe d’apaisement.

 

— Je ne juge pas, répondit-il. Je possède aussi une sacrée brûlure à la jambe, à cause de ma première fusion. Je crois que tous les héritiers passent par là. J’imagine que la situation l’exigeait.
— Pour ce que ça a donné, marmonna Davos.

 

Anasteria avait presque manqué la remarque de Davos, mais elle se tourna vers lui. Son regard brûlait de colère envers elle. Elle pouvait aisément le comprendre, mais sentait qu’elle possédait une occasion de s’expliquer avec lui.

 

— Davos, écoute.
— La ferme, intervint-il. Si tu veux me dire que tu es désolée, garde ta salive. J’ignore ce qui se passe avec toi, mais tu n’es pas spéciale ! Ton pouvoir n’a pas pu sauver ma sœur. 
— Davos, j’ai essayé ! Je suis arrivée trop tard !

 

Davos se leva soudainement, renversant au passage sa chaise. Tout son corps demeurait tendu, et il serrait tellement ses poings, qu’Anasteria voyait ses phalanges devenir blanches. Et pendant un instant, elle pensait vraiment que Davos allait lui sauter dessus de rage.

 

— Si ma sœur ne s’était pas trouvée avec toi à ce moment-là, elle serait encore en vie.
— Il n’y a pas un mot que tu prononces là que je ne me suis pas répété en boucle pendant des semaines…
— Et ? Tu te sens coupable ? Ce n’est pas ça qui ramènera Laurène ! 

 

Davos effectua un pas vers Anasteria, et cette dernière pouvait sentir Johan et Ivona se tendre derrière elle, prêts à intervenir. Mais Masilda prit les devants, et son bras empêcha Davos de continuer. 

 

— Ça suffit, ordonna-t-elle. Vous n’êtes pas venu ici pour vous battre sous notre regard. On veut comprendre ce qui s’est passé.
— C’est simple, vous êtes tous les trois responsables, vociféra Davos.
— Davos, soupira Johan, on a essayé de la sauver, mais on est arrivé trop tard !
— Tais-toi Johan ! On était ami, et tu ne m’as même pas prévenu que tu allais la chercher ! 
— Je l’ai empêché, intervint Ivona. Si tu as un problème avec ça, règle-le avec moi. Pas avec lui.

 

 Le regard de Davos s’assombrit un peu plus. Ce n’était pas un secret qu’il n’appréciait pas Ivona, et cette dernière n’arrangeait clairement pas les choses. Mais avant que la situation ne s’envenime, Zèfir prit Davos de court.

 

— Laurène a été happée dans la faille en même temps qu’Anasteria, c’est ça ? Pour toi, ce n’est qu’un simple concours de circonstances ? Elle se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment ?
— J’ignore ce que vous insinuez, souffla Davos. Mais Laurène ne savait pas se battre ! Elle détestait ses pouvoirs. Je ne comprends même pas comment quelqu’un comme elle a pu finir comme ça…
— C’est à cause d’Emely, avoua Anasteria. C’est elle qui l’a transformé, mais j’ignore comment.
— Emely ? Qui est-ce ? demanda Zèfir.

 

Anasteria soupira. Dans ses cauchemars, Emely revenait toujours. Cette fille possédait quelque chose de sinistre qu’Anasteria n’avait jamais croisé auparavant. 

 

— C’est une adolescente, je dirais qu’elle a plus ou moins notre âge. Je l’ai vu en rêve, et après dans l’autre côté. On s’est battu, mais elle est forte.
— Vraiment très forte, intervint Ivona. Je crois que c’était une sombremage, elle manipulait les ombres. Je ne comprends pas comment quelqu’un d’à peine plus âgé que nous peut être si fort.
— Certaines personnes passent leur vie à se battre, expliqua Masilda. Tout le monde n’a pas la chance de vivre dans un empire qui les protège, ou dans une famille. Lorsqu’on survit depuis son plus jeune âge, on devient plus fort que les autres.
— Elle ne voulait pas me tuer, répondit Anasteria. Elle essayait de me recruter, de faire en sorte que je travaille avec elle pour le Patriarche. Elle disait qu’avec son pouvoir, je pourrais éviter à d’autres d’être blessés. 

 

Elle serra son poing en repensant à Laurène. Elle mentirait si elle ne souhaitait pas revenir en arrière et changer son destin. Mais elle savait pertinemment que le marché proposé par Emely ne permettait pas une telle chose, et que la seule issue qui l’attendait, c’était les ténèbres et les souffrances. Elle soupira.

 

— Ce n’était pas une sombremage, reprit-elle. Mon esprit l’a appelée ténèbrae...

 

Le visage de Zèfir s’assombrit aussitôt.

 

— J’aurais dû m’en douter, souffla-t-il. 
— Je suis désolé, intervint Johan. Mais, je ne comprends rien à ce qui se passe.

 

Zèfir marqua un temps d’arrêt. Visiblement, il cherchait ses prochains mots avec soin. 

 

— J’aimerais avoir beaucoup d’informations, mais même pour moi, c’est très flou. De ce que je sais, les ténèbrae nous ressemblent, car ils possèdent un sang ancien, celui du Patriarche. Ils font vraiment qu’un avec leur ombre comme nous avec nos esprits. J’en ai déjà croisé quelques-uns. Je suspectais qu’ils œuvraient contre les héritiers, et on dirait que j’ai raison. Pour l’instant, je n’ai jamais trouvé d’autres héritiers, tu es la première que je rencontre.

 

Anasteria ne cacha pas sa surprise.

 

— Je croyais que le Patriarche était une ombre, pas un ancien.
— Difficile de savoir ce qu’il est vraiment, soupira Zèfir. 
— On est si peu ?
— Oui. J’ai cru comprendre qu’on était plus nombreux dans l’empire, il y’a de cela quelques dizaines d’années. Mais plus maintenant. Et si le Patriarche nous traque avec ses agents, cela explique sans doute notre rareté.
— Alors, on n’a plus de choix, soupira Masilda. 

 

Masilda prit un instant pour fixer tour à tour chaque étudiant, mais elle s’attarda un peu plus sur Davos. Il n’avait plus reparlé, mais son regard noir s’exprimait pour lui.

 

— Je suppose que vous avez entendu les nouvelles de la capitale, continua-t-elle
— Vous parlez de la loi d’urgence ? demanda Ivona.
— Oui. Notre pays traverse beaucoup de problèmes. L’inquisition méridienne reprend du service, sans compter les ombres qui menacent les amagus. Pour ne rien arranger, on dirait qu’on doit trouver les ennemis à l’intérieur de nos murs. Votre ténèbrae ne peut pas agir sans l’aide de plusieurs personnes ici, c’est impossible. Mais en attendant qu’on démasque les traîtres et qu’on les envoie en prison, on doit s’occuper de vous.

 

Un pic de panique traversa le cœur de Johan, et il s’empressa d’intervenir.

 

— On n’a rien fait !
— C’est ce que tu dis, murmura Davos.

 

La remarque n’échappa pas à personne, et Johan se tourna vers son ancien ami avec une expression outrée.

 

— Tu ne crois quand même pas que j’ai quelque chose à voir avec ça ?
— Peut-être pas toi, souffla-t-il. Mais tes amies que tu adores tellement…
— Arrête Davos, intervint sèchement Johan. Elles n’ont rien fait à Laurène.
— Tu parles beaucoup pour quelqu’un qui était tout aussi présent que nous durant les incidents, constata Ivona. À ta place, je ferais profil bas.

 

Davos se leva d’un bond et en un instant, il se retrouva devant Ivona. Sa main agrippa le col de l’adolescente. Anasteria se leva à son tour, prête à repousser violemment Davos, mais son amie ne semblait pas avoir besoin d’aide. Elle arqua un sourcil dédaigneux.

 

— Fais attention à toi, Eis, siffla Davos.
— Je tremble de peur De Vila, lâcha-t-elle, avec un sourire arrogant.
— Arrêtez !

 

La voix forte de Masilda résonna, et elle attrapa d’une main ferme l’épaule de Davos pour l’éloigner d’Ivona. 

 

— Encore une fois, on ne vous a pas amené ici pour vous battre. Une enquête est en cours. Et croyez-moi, on dénichera les coupables. Donc si vous n’avez rien à vous reprocher…

 

Davos se dégagea de l’emprise de Masilda et s’éloigna.

 

— Bien sûr que je n’ai rien à me reprocher, pesta-t-il. C’est ma sœur jumelle qui est morte !
— Nous sommes désolés, répondit Zèfir. On met tout en œuvre pour trouver le responsable, et éviter que ce genre de malheur ne se reproduise.

 

Davos ne répondit que par un hochement de tête grave, et détourna le regard pour ne plus observer Ivona. Cependant, Anasteria remarqua que ses poings ne s’étaient pas desserrés. Intérieurement, il devait bouillonner. Masilda soupira et secoua la tête.

 

— Comme je disais, le Collège doit gérer beaucoup de choses. C’est pour cette raison que la loi d’urgence a été votée. Il s’agit d’un dispositif qui nous permet d’avoir plus de pouvoir pour les situations de crise. Avec les incidents qui se déroulent un peu partout, et le contexte ici, dus à ta présence, Anasteria, nous avons décidé de vous recruter en tant qu’aspirants-chevalier-mage.
— Aspirant ? demanda Anasteria, confuse. C’est quoi ?
— Avec la loi, on peut enrôler des mages qui n’ont pas encore passé leur confirmation, principalement pour nous aider sur les missions mineures. 

 

Un court silence s’abattit dans la salle le temps que les étudiants réalisent l’implication derrière cette nouvelle. Et la révélation arriva en même temps pour Anasteria et ses amis qui essayèrent de protester dans une cacophonie incompréhensible. Masilda leva alors la main pour demander le silence.

 

— Un à la fois !
— Madame, on n’est pas du tout prêt pour ça, plaida Ivona pour les autres. Aucun de nous n’a passé sa confirmation.

 

Elle s’arrêta un instant pour fixer Anasteria.

 

— Enfin, je ne suis pas sûre qu’on peut dire que c’était une confirmation dans ton cas… Bref, on n’est pas vraiment prêt pour ça.
— Vous avez affronté des ombres par trois fois, en deux ans, souffla Masilda. C’est trois plus que la plupart des étudiants qui rejoignent nos rangs cette année. De plus, la présence d’Anasteria à elle seule suffit à faire de l’académie un danger. Que vous soyez d’accord ou non, on ne peut pas la laisser ici.

 

Anasteria soupira longuement. Emely avait raison au final. Elle devenait une catastrophe autour d’elle. 

 

— Écoutez, intervint Zèfir. Vos familles ont déjà donné leurs accords, en ce qui concerne Ivona et Davos. Johan, tu es sous la responsabilité du Collège, vu ton statut. Mais vous êtes jeunes, on en est conscient. Les autres aspirants que nous recrutons sont en dernière année. C’est pourquoi vous êtes en droit de refuser.

 

Il remarqua une pause, et son regard se posa sur Anasteria. Elle pouvait deviner la suite.

 

— Malheureusement, cela ne s’applique pas pour toi, Anasteria. On ne peut pas te laisser ici, c’est trop dangereux.
— Alors, sortir Anasteria d’ici pourrait résoudre le problème de l’académie, mais pas sa sécurité à elle, répliqua Ivona. Une fois dehors, le Patriarche continuera de l’attaquer.
— Ouai, intervint Johan. Vous déplacez juste le problème ! Ce n’est pas une solution.

 

L’empressement de ses amis à la défendre arracha un sourire difficile à Anasteria. 

 

— Vous êtes mages, soupira Masilda. Votre vie sera faite de combat, de mort, et de souffrance, que vous ayez quinze, ou cinquante ans. C’est immuable, et c’est notre destinée à tous.
— Toi plus que les autres Anasteria, intervint Zèfir. J’aimerais te dire que ça va s’arranger, mais si le Patriarche sait que tu existes, ça ne fait que commencer.
— J’adore ma vie, murmura Anasteria.
— Tout ne va pas se résoudre tout de suite, expliqua Zèfir. On veut vous laisser le temps de réfléchir. Et nous devons organiser pas mal de choses de notre côté.

 

Anasteria se mordit la lèvre inférieure pour empêcher une quelconque remarque acerbe de sortir. Elle se demandait ce qu’elle avait dû faire dans une vie antérieure pour jouer de malchance à ce point. En résumé, elle n’avait aucune solution. Elle devait quitter l’académie, peu importe ce qu’elle souhaitait. Bien sûr, elle avait toujours voulu parcourir le monde en quête d’aventures, mais pas comme ça. De plus, elle embarquait tout le monde là-dedans, même Davos qui devait la haïr un peu plus.

 

— Prenez votre temps pour réfléchir, ajouta Zèfir. Et si tu sens quelque chose, Anasteria vient me voir.

 

Elle aurait préféré se réveiller de cet affreux cauchemar, mais malheureusement c’était bel et bien sa réalité. Elle hocha de la tête sincèrement. Maintenant qu’elle savait qu’elle n’était plus seule, elle ferait son possible pour comprendre ses pouvoirs et cette situation. Les quatre étudiants sortirent de la pièce, et Davos ne prit même pas la peine de regarder ses anciens amis. Johan lâcha un soupir à peine audible devant la scène. Les prochains jours s’annonçaient déjà bien compliqués.

 

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